C’est une véritable bataille rangée qui oppose depuis le 15 avril dernier la population paysanne et les forces de l’ordre dans le village de Dong Tâm, une agglomération située dans la circonscription administrative de Hanoi, à 30 km de la capitale. Quatre paysans ont été arrêtés par les agents de la Sécurité publique, mais les villageois se sont emparés d’une trentaine de policiers et un certain nombre d’entre eux sont encore aujourd’hui gardés en otage. Le village est cerné par les forces de l’ordre. L’ensemble de la population de Dong Tâm soutient un véritable siège.
Si l’affaire qui vient de s’envenimer a ses racines dans une querelle qui date, semble-t-il, de plusieurs années et concerne la propriété des terres du village, il existe aujourd’hui un désaccord profond entre population et autorités locales au sujet des terrains utilisés par les paysans. Ce conflit n’a rien d’original. Il est semblable à des centaines d’autres que l’on peut constater un peu partout dans les campagnes vietnamiennes. Mais à Dông Tâm, il a pris une ampleur et une intensité peu communes.
Trente policiers retenus en otage par la population en colère
Après un premier litige en 2014, les choses se gâtent véritablement au mois de novembre 2016, lorsque 6,8 ha de terrain du village sont expropriés par les autorités au profit d’une entreprise de téléphonie mobile, Viêttel, pour y construire une résidence. Le terrain en question, situé sur la commune de Dông Tâm, n’est éloigné du centre de Hanoi que de trente kilomètres.
Le 11 novembre 2016, des représentants des cultivateurs de Dong Tâm rencontrent le président du Comité populaire du district et lui remettent une plainte accusant le pouvoir de s’être emparé des « terres du peuple ». Dans les premiers jours du mois d’avril 2017, les autorités régionales arrêtent un vieil homme du village, M. Kinh, âgé de 80 ans. On lui reproche des commentaires prononcés par lui au sujet de l’expropriation des terres. C’est le 15 avril que le conflit s’est transformé en émeute lorsque les forces policières ont été dépêchées pour s’emparer de force des terres déjà attribuées à l’entreprise de téléphonie. La population s’est opposée à la confiscation des terrains, mais aussi à la récente l’arrestation de neuf cultivateurs des environs. Les protestataires ont attaqué les forces de l’ordre à coups de pierres et, finalement, ont réussi à se saisir de trente agents qu’ils ont gardés en otage.
Dans les jours qui suivent, bien que la police ait relâché plusieurs paysans arrêtés, les villageois ont refusé de relâcher les agents gardés en otage et ont organisé la résistance. Une station de radio créée par eux lance des accusations contre le gouvernement et appelle la population à une résistance non violente.
Le 17 avril, le président du Comité populaire de la ville de Hanoi, considéré comme un des hommes politiques importants du pays, s’est entretenu, par téléphone, avec les protestataires à qui il a demandé le calme et promis de régler l’affaire avec justice. Malgré cette intervention, les protestataires de Dong Tâm n’ont pas libéré les agents des forces de l’ordre gardés en otage.
Acuité des conflits fonciers dans un régime où la terre appartient « au peuple tout entier »
Le 20 avril, bien que le face-à-face entre la population de Dong Tâm et les forces de l’ordre se poursuivent encore, la tension est quelque peu retombée. Un certain nombre d’agents de police ont été relâchés. Dans la matinée, le président du Comité populaire de la ville de Hanoi a ordonné une enquête générale sur la gestion et l’utilisation des terrains dans le district de My Duc, district auquel est rattachée la commune de Dong Tâm.
La violence des réactions des habitants de Dong Tâm face à la confiscation d’un terrain du village souligne l’importance actuelle de la question foncière pour la société vietnamienne où l’agriculture tient encore une très large part. Dans la dernière version de la loi foncière vietnamienne, qui date de 2013, il est affirmé dès le premier chapitre que la terre est la propriété « du peuple tout entier » et l’Etat son représentant. Cette absence de propriété privée des terres est à l’origine de très nombreux conflits.
La Conférence des évêques catholiques du Vietnam a pris position sur ce sujet depuis longtemps et à plusieurs reprises. Dans le projet d’amendement de la Constitution, envoyé par les évêques aux autorités gouvernementales en 2013, les évêques regrettent l’absence de la propriété privée des terres, celle-ci étant une source de liberté pour les citoyens. (eda/jm)
(Source: Eglises d'Asie, le 21 avril 2017)
Si l’affaire qui vient de s’envenimer a ses racines dans une querelle qui date, semble-t-il, de plusieurs années et concerne la propriété des terres du village, il existe aujourd’hui un désaccord profond entre population et autorités locales au sujet des terrains utilisés par les paysans. Ce conflit n’a rien d’original. Il est semblable à des centaines d’autres que l’on peut constater un peu partout dans les campagnes vietnamiennes. Mais à Dông Tâm, il a pris une ampleur et une intensité peu communes.
Trente policiers retenus en otage par la population en colère
Après un premier litige en 2014, les choses se gâtent véritablement au mois de novembre 2016, lorsque 6,8 ha de terrain du village sont expropriés par les autorités au profit d’une entreprise de téléphonie mobile, Viêttel, pour y construire une résidence. Le terrain en question, situé sur la commune de Dông Tâm, n’est éloigné du centre de Hanoi que de trente kilomètres.
Le 11 novembre 2016, des représentants des cultivateurs de Dong Tâm rencontrent le président du Comité populaire du district et lui remettent une plainte accusant le pouvoir de s’être emparé des « terres du peuple ». Dans les premiers jours du mois d’avril 2017, les autorités régionales arrêtent un vieil homme du village, M. Kinh, âgé de 80 ans. On lui reproche des commentaires prononcés par lui au sujet de l’expropriation des terres. C’est le 15 avril que le conflit s’est transformé en émeute lorsque les forces policières ont été dépêchées pour s’emparer de force des terres déjà attribuées à l’entreprise de téléphonie. La population s’est opposée à la confiscation des terrains, mais aussi à la récente l’arrestation de neuf cultivateurs des environs. Les protestataires ont attaqué les forces de l’ordre à coups de pierres et, finalement, ont réussi à se saisir de trente agents qu’ils ont gardés en otage.
Dans les jours qui suivent, bien que la police ait relâché plusieurs paysans arrêtés, les villageois ont refusé de relâcher les agents gardés en otage et ont organisé la résistance. Une station de radio créée par eux lance des accusations contre le gouvernement et appelle la population à une résistance non violente.
Le 17 avril, le président du Comité populaire de la ville de Hanoi, considéré comme un des hommes politiques importants du pays, s’est entretenu, par téléphone, avec les protestataires à qui il a demandé le calme et promis de régler l’affaire avec justice. Malgré cette intervention, les protestataires de Dong Tâm n’ont pas libéré les agents des forces de l’ordre gardés en otage.
Acuité des conflits fonciers dans un régime où la terre appartient « au peuple tout entier »
Le 20 avril, bien que le face-à-face entre la population de Dong Tâm et les forces de l’ordre se poursuivent encore, la tension est quelque peu retombée. Un certain nombre d’agents de police ont été relâchés. Dans la matinée, le président du Comité populaire de la ville de Hanoi a ordonné une enquête générale sur la gestion et l’utilisation des terrains dans le district de My Duc, district auquel est rattachée la commune de Dong Tâm.
La violence des réactions des habitants de Dong Tâm face à la confiscation d’un terrain du village souligne l’importance actuelle de la question foncière pour la société vietnamienne où l’agriculture tient encore une très large part. Dans la dernière version de la loi foncière vietnamienne, qui date de 2013, il est affirmé dès le premier chapitre que la terre est la propriété « du peuple tout entier » et l’Etat son représentant. Cette absence de propriété privée des terres est à l’origine de très nombreux conflits.
La Conférence des évêques catholiques du Vietnam a pris position sur ce sujet depuis longtemps et à plusieurs reprises. Dans le projet d’amendement de la Constitution, envoyé par les évêques aux autorités gouvernementales en 2013, les évêques regrettent l’absence de la propriété privée des terres, celle-ci étant une source de liberté pour les citoyens. (eda/jm)
(Source: Eglises d'Asie, le 21 avril 2017)