Le président de la Conférence épiscopale vietnamienne, l’archevêque Mgr Paul Bui Van Doc était le représentant de l’Église du Vietnam lors des manifestations organisées par l’Église de Corée du Sud du 14 au 18 août 2014, en présence du pape François.
À son retour, l’archevêque a accordé une interview à Radio Free Asia en langue vietnamienne. Le script a été mis en ligne le 24 août 2014 (1). La traduction ci-dessous est de la rédaction d’Églises d’Asie.
Mgr P. Bui Van Doc : Ce qui m’a le plus frappé, c’est la joie [du pape François]. Il l’a manifestée dès le début de notre rencontre en apprenant que j’étais le président de la Conférence épiscopale du Vietnam. J’ai constaté chez lui une attitude de dialogue, de disponibilité, d’ouverture à l’égard de tous, et à l’égard du Vietnam (…). Il savait que nous suivions la voie proposée par le Saint-Siège, ce qui le réjouissait.
Il m’a aussi rappelé un certain nombre de faits. J’ai compris qu’il était heureux de me dire : «J’ai rencontré le responsable de l’Assemblée nationale du Vietnam ! » (2). Il souriait en me disant cela. Je ne m’attendais pas du tout à ce qu’il me rappelle cette rencontre.
Durant toute sa conversation avec moi, il s’est montré tout à fait à son aise et détendu.
Radio Free Asia : Après ce séjour où vous avez participé à d’importantes manifestations, quelle remarques pourriez-vous faire sur l’Église de Corée ?
Avant tout, l’Église de Corée du Sud est une Église extrêmement vivante, très dynamique. Elle s’est fortement engagée dans l’annonce de la Bonne Nouvelle. La hiérarchie et le clergé coréens font preuve d’une réelle efficience dans l’organisation ecclésiale comme en toute chose. J’ai pu constater que l’organisation de l’accueil du Saint-Père et des évêques, comme d’ailleurs l’organisation du Congrès de la jeunesse, ou encore de la cérémonie de canonisation, a été une réussite, ainsi qu’une source de joies et de forces vives.
J’ai perçu clairement une seconde caractéristique de cette Église. A mon avis, elle dépasse peut-être en ce domaine l’Église du Vietnam (même si le clergé et la hiérarchie vietnamienne sont de grande qualité, et sont débordants de dynamisme). J’ai eu le sentiment que le laïcat coréen était plus dynamique que le laïcat vietnamien. Sans doute parce qu'à l’origine, l’Église de Corée et l’édification de la première communauté chrétienne ont été l’œuvre des laïcs. Ainsi, le rôle du laïcat est très important au sein de cette Église. Il existe beaucoup de jeunes laïcs, très enthousiastes, lesquels sont volontaires pour l’organisation des cérémonies durant ce type de manifestations.
Voilà donc la leçon que j’ai tirée de cette expérience. A l’avenir j’insisterai sur ce point : encourager les laïcs à participer avec encore plus d’enthousiasme et de dynamisme aux activités de l’Église, plus spécialement en ce qui concerne l’annonce de l’Évangile.
C’est sans doute aussi une leçon que vous diffuserez dans les principaux diocèses du Vietnam ?
C’est exact. C’est une leçon sur laquelle j’insisterai dès que l’occasion s’en présentera : inviter les laïcs à une participation plus intense et plus concrète aux activités de l’Église, en particulier en ce qui concerne l’évangélisation.
Assurément, il y a des point que nous devons reconnaître. Le Vietnam conserve plus ou moins - le phénomène a peut-être perdu aujourd’hui de sa gravité -, des formes de cléricalisme. Dans les endroits où elles existent, il faut encourager les prêtres à faire les plus grands efforts pour abandonner un tel état d’esprit. Il faut les inviter à appeler la collaboration de tous et plus particulièrement de la jeunesse.
Avez-vous eu l’occasion de rencontrer les groupes de jeunes catholiques (vietnamiens) qui ont participé au congrès de la jeunesse catholique asiatique ?
Ils sont venus me rencontrer avant leur départ. Le père Viêt, leur responsable, les a conduits vers moi. Il y avait aussi un prêtre de Hai Phong qui a participé à l’animation du groupe. Après mon arrivée en Corée du Sud, j’ai constaté qu’il y avait aussi Mgr Viên, évêque auxiliaire du diocèse de Vinh, venu en qualité de participant au Congrès des jeunes. Il a remplacé Mgr Thiên, évêque du diocèse de Hai Phong, chargé de la jeunesse.
Les jeunes Vietnamiens ont été, eux aussi, enthousiastes et joyeux. Mais, sous un certain aspect, leur participation a été moins intense qu’en certains autres lieux (…). Nos compatriotes ont fait des efforts, mais leur présence ne s’est pas beaucoup fait remarquer.
Il faut peut-être en trouver la raison dans le fait que l’Église sud-coréenne a voulu laisser la priorité à certaines minorités. Ainsi pour poser les questions à débattre avec le pape François, les organisateurs ont choisi trois jeunes ; l’un était un étudiant cambodgien venant d’une communauté très peu nombreuse avec peu de laïcs ; le second était un étudiant de Hong Kong et le troisième était Sud-Coréen. On a pas vu de représentants du Vietnam, un pays voisin où l’Église est plus nombreuse. Mais j’ai compris qu’on voulait encourager les minorités, ce qui est une bonne chose.
Comme beaucoup de personnes, Monseigneur, vous souhaitez que le Vietnam obtienne un jour la même opportunité que la Corée. Comment le Vietnam devrait-il se préparer pour qu’un tel événement puisse se produire sur son sol ?
À mon avis, il est maintenant trop tard pour inviter le pape pour les années 2014 et 2015. Si nous l’invitons, ce serait au plus tôt pour l’année 2016 ou les années suivantes. Si nous pouvions inviter le souverain pontife, que celui-ci soit disponible pour venir au Vietnam, et que le gouvernement nous fournisse les conditions nécessaires pour son voyage au Vietnam, nous en serions ravis.
J’ai l’impression que le Saint-Père est très accommodant. Il ne se montre pas difficile et n’exige pas que l’organisation soit réalisée de telle ou telle façon. Partout où il va, il est à son aise, toujours satisfait et content. Donc il n’y a pas de crainte à avoir, ni de souci à se faire sur la façon d’organiser sa visite. Naturellement il faudrait une préparation de toute l’Église, avec ses trois provinces ecclésiastiques qui sont les trois régions du Vietnam (Sud, Nord et Centre).
Par contre, ce qui constituerait un vrai souci, ce serait de trouver, pour accueillir le souverain pontife, des lieux aussi vastes que ceux qui l’ont accueilli en Corée, et il y en avait beaucoup. Dans celui où a été célébrée la canonisation, on pu se rassembler, m’a-t-on dit, un million de personnes. Il sera sans doute plus difficile au Vietnam, de trouver un lieu aussi vaste…
Mais, enfin, si la visite se fait, nous trouverons une solution. Ne nous inquiétons pas sans raison ! (eda/jm)
(1) http://www.rfa.org/vietnamese/in_depth/lesson-fr-skorea-08242014050823.html
(2) Il s’agit de Nguyên Sinh Hung, doyen de l’Assemblée nationale et membre important du Bureau politique. Voir http://eglasie.mepasie.org/asie-du-sud-est/vietnam/2014-03-25-le-quatrieme-personnage-politique-du-vietnam-est-venu-rencontrer-le-pape-francois
(Source: Eglises d'Asie, le 26 août 2014)
À son retour, l’archevêque a accordé une interview à Radio Free Asia en langue vietnamienne. Le script a été mis en ligne le 24 août 2014 (1). La traduction ci-dessous est de la rédaction d’Églises d’Asie.
Mgr P. Bui Van Doc : Ce qui m’a le plus frappé, c’est la joie [du pape François]. Il l’a manifestée dès le début de notre rencontre en apprenant que j’étais le président de la Conférence épiscopale du Vietnam. J’ai constaté chez lui une attitude de dialogue, de disponibilité, d’ouverture à l’égard de tous, et à l’égard du Vietnam (…). Il savait que nous suivions la voie proposée par le Saint-Siège, ce qui le réjouissait.
Il m’a aussi rappelé un certain nombre de faits. J’ai compris qu’il était heureux de me dire : «J’ai rencontré le responsable de l’Assemblée nationale du Vietnam ! » (2). Il souriait en me disant cela. Je ne m’attendais pas du tout à ce qu’il me rappelle cette rencontre.
Durant toute sa conversation avec moi, il s’est montré tout à fait à son aise et détendu.
Radio Free Asia : Après ce séjour où vous avez participé à d’importantes manifestations, quelle remarques pourriez-vous faire sur l’Église de Corée ?
Avant tout, l’Église de Corée du Sud est une Église extrêmement vivante, très dynamique. Elle s’est fortement engagée dans l’annonce de la Bonne Nouvelle. La hiérarchie et le clergé coréens font preuve d’une réelle efficience dans l’organisation ecclésiale comme en toute chose. J’ai pu constater que l’organisation de l’accueil du Saint-Père et des évêques, comme d’ailleurs l’organisation du Congrès de la jeunesse, ou encore de la cérémonie de canonisation, a été une réussite, ainsi qu’une source de joies et de forces vives.
J’ai perçu clairement une seconde caractéristique de cette Église. A mon avis, elle dépasse peut-être en ce domaine l’Église du Vietnam (même si le clergé et la hiérarchie vietnamienne sont de grande qualité, et sont débordants de dynamisme). J’ai eu le sentiment que le laïcat coréen était plus dynamique que le laïcat vietnamien. Sans doute parce qu'à l’origine, l’Église de Corée et l’édification de la première communauté chrétienne ont été l’œuvre des laïcs. Ainsi, le rôle du laïcat est très important au sein de cette Église. Il existe beaucoup de jeunes laïcs, très enthousiastes, lesquels sont volontaires pour l’organisation des cérémonies durant ce type de manifestations.
Voilà donc la leçon que j’ai tirée de cette expérience. A l’avenir j’insisterai sur ce point : encourager les laïcs à participer avec encore plus d’enthousiasme et de dynamisme aux activités de l’Église, plus spécialement en ce qui concerne l’annonce de l’Évangile.
C’est sans doute aussi une leçon que vous diffuserez dans les principaux diocèses du Vietnam ?
C’est exact. C’est une leçon sur laquelle j’insisterai dès que l’occasion s’en présentera : inviter les laïcs à une participation plus intense et plus concrète aux activités de l’Église, en particulier en ce qui concerne l’évangélisation.
Assurément, il y a des point que nous devons reconnaître. Le Vietnam conserve plus ou moins - le phénomène a peut-être perdu aujourd’hui de sa gravité -, des formes de cléricalisme. Dans les endroits où elles existent, il faut encourager les prêtres à faire les plus grands efforts pour abandonner un tel état d’esprit. Il faut les inviter à appeler la collaboration de tous et plus particulièrement de la jeunesse.
Avez-vous eu l’occasion de rencontrer les groupes de jeunes catholiques (vietnamiens) qui ont participé au congrès de la jeunesse catholique asiatique ?
Ils sont venus me rencontrer avant leur départ. Le père Viêt, leur responsable, les a conduits vers moi. Il y avait aussi un prêtre de Hai Phong qui a participé à l’animation du groupe. Après mon arrivée en Corée du Sud, j’ai constaté qu’il y avait aussi Mgr Viên, évêque auxiliaire du diocèse de Vinh, venu en qualité de participant au Congrès des jeunes. Il a remplacé Mgr Thiên, évêque du diocèse de Hai Phong, chargé de la jeunesse.
Les jeunes Vietnamiens ont été, eux aussi, enthousiastes et joyeux. Mais, sous un certain aspect, leur participation a été moins intense qu’en certains autres lieux (…). Nos compatriotes ont fait des efforts, mais leur présence ne s’est pas beaucoup fait remarquer.
Il faut peut-être en trouver la raison dans le fait que l’Église sud-coréenne a voulu laisser la priorité à certaines minorités. Ainsi pour poser les questions à débattre avec le pape François, les organisateurs ont choisi trois jeunes ; l’un était un étudiant cambodgien venant d’une communauté très peu nombreuse avec peu de laïcs ; le second était un étudiant de Hong Kong et le troisième était Sud-Coréen. On a pas vu de représentants du Vietnam, un pays voisin où l’Église est plus nombreuse. Mais j’ai compris qu’on voulait encourager les minorités, ce qui est une bonne chose.
Comme beaucoup de personnes, Monseigneur, vous souhaitez que le Vietnam obtienne un jour la même opportunité que la Corée. Comment le Vietnam devrait-il se préparer pour qu’un tel événement puisse se produire sur son sol ?
À mon avis, il est maintenant trop tard pour inviter le pape pour les années 2014 et 2015. Si nous l’invitons, ce serait au plus tôt pour l’année 2016 ou les années suivantes. Si nous pouvions inviter le souverain pontife, que celui-ci soit disponible pour venir au Vietnam, et que le gouvernement nous fournisse les conditions nécessaires pour son voyage au Vietnam, nous en serions ravis.
J’ai l’impression que le Saint-Père est très accommodant. Il ne se montre pas difficile et n’exige pas que l’organisation soit réalisée de telle ou telle façon. Partout où il va, il est à son aise, toujours satisfait et content. Donc il n’y a pas de crainte à avoir, ni de souci à se faire sur la façon d’organiser sa visite. Naturellement il faudrait une préparation de toute l’Église, avec ses trois provinces ecclésiastiques qui sont les trois régions du Vietnam (Sud, Nord et Centre).
Par contre, ce qui constituerait un vrai souci, ce serait de trouver, pour accueillir le souverain pontife, des lieux aussi vastes que ceux qui l’ont accueilli en Corée, et il y en avait beaucoup. Dans celui où a été célébrée la canonisation, on pu se rassembler, m’a-t-on dit, un million de personnes. Il sera sans doute plus difficile au Vietnam, de trouver un lieu aussi vaste…
Mais, enfin, si la visite se fait, nous trouverons une solution. Ne nous inquiétons pas sans raison ! (eda/jm)
(1) http://www.rfa.org/vietnamese/in_depth/lesson-fr-skorea-08242014050823.html
(2) Il s’agit de Nguyên Sinh Hung, doyen de l’Assemblée nationale et membre important du Bureau politique. Voir http://eglasie.mepasie.org/asie-du-sud-est/vietnam/2014-03-25-le-quatrieme-personnage-politique-du-vietnam-est-venu-rencontrer-le-pape-francois
(Source: Eglises d'Asie, le 26 août 2014)