Le suivi statistique de l’Eglise catholique en Chine n’est pas aisé. L’Eglise y est divisée en communautés « officielles » et « clandestines », le régime communiste a une conception plus politique que scientifique des statistiques qu’il produit et l’absence de réelle liberté religieuse dans ce pays empêche de mener
des études indépendantes et rigoureuses sur le sujet. Malgré tout, des données existent et les plus récentes indiquent une certaine difficulté pour les catholiques à se maintenir autour de 1 % de la population du pays ainsi qu’un déclin notable des vocations sacerdotales et religieuses.
Anthony Lam Sui-ki est chercheur au Centre d’études du Saint-Esprit, le centre de recherches sur la Chine du diocèse de Hongkong. Depuis de longues années, il compile les données et les études sur le sujet; il livre ses conclusions dans un article de la dernière livraison de la revue Tripod. Selon lui, la tendance qui émerge de ces dernières dix années est celle d’une stagnation du nombre des catholiques, stagnation qui se traduit par ricochet par une baisse du nombre des vocations sacerdotales et religieuses.
A peine 1% de catholiques parmi 1,3 milliard d’habitants
Concernant le nombre des catholiques en Chine, la fourchette la plus plausible oscille entre 9 et 12 millions de fidèles. Une étude de l’Académie chinoise des sciences sociales d’août 2010 donnait le chiffre de 5,7 millions de catholiques, ce qui ne refléterait que la partie « officielle » du catholicisme chinois. Selon Anthony Lam, le chiffre le plus crédible, toutes communautés confondues, serait plus proche des 10,5 millions de fidèles, soit un petit 1 % de la population du pays (0,77 % très précisément). Ce qui confirme une réalité bien connue: le catholicisme est très minoritaire en Chine populaire, et les choses accusent ici une certaine stabilité: en 1949, date de la prise du pouvoir par Mao Zedong, les catholiques étaient 3 millions pour une population totale de 500 millions, soit une proportion de 0,60 %.
Plus intéressant est le fait que la croissance de la communauté catholique, qui était manifeste dans les années 1990 et début 2000, semble avoir atteint un plateau. Anthony Lam étaye ainsi sa démonstration: en prenant comme base une communauté de 12 millions de fidèles, dont l’espérance de vie serait semblable à celle de l’ensemble de la population (75,6 ans), et en présumant que l’âge moyen au baptême est de 18 ans, chaque année, l’Eglise devrait enregistrer 210 000 nouveaux baptisés pour ne serait-ce que compenser les décès naturels. Et ceci sans prendre en compte d’éventuelles « pertes en ligne », que représenteraient le départ de catholiques vers d’autres Eglises, religions ou la non-croyance.
Selon les données de la partie « officielle » de l’Eglise, entre 2004 et 2010, le nombre annuel moyen de baptêmes a oscillé entre 90 000 et 100 000. Si l’on ajoute à ce chiffre celui des baptêmes des communautés « clandestines », on peut penser que le chiffre des 210 000 nouveaux baptisés nécessaires au maintien du nombre des catholiques en Chine était peu ou prou atteint. Or, depuis 2010, le déclin est patent: entre 2011 et 2015, le nombre moyen des baptêmes célébrés lors de la Vigile pascale a été de 21 500. Si on y ajoute les baptêmes célébrés à d’autres moments de l’année, on arrive à 30 000 - 35 000 baptêmes/an au sein des communautés « officielles ». Même en y ajoutant les baptêmes des communautés « clandestines », on n’atteint pas – et de loin, semble-t-il – les 210 000 baptêmes nécessaires. Conclusion du chercheur hongkongais: « Il paraît évident que le nombre des catholiques va en diminuant. »
Net déclin des vocations sacerdotales et religieuses
Après une phase de croissance très nette, dans les années 1980, 1990 et début 2000, la population catholique aurait donc atteint un plateau, voire aurait commencé à décliner. « Ce retournement va entraîner une baisse du nombre des vocations, même si ce dernier phénomène prendra quelques années à se concrétiser pleinement », explique encore Anthony Lam. En 2000, toutes communautés confondues, on a compté 134 ordinations sacerdotales, le chiffre est monté à 171 en 2002 et n’a jamais été dépassé depuis. Entre 2005 et 2011, le déclin est quasi continu, jusqu’à seulement 46 ordinations en cette année 2011. Le léger mieux des années 2012 à 2014 (74 ordinations en moyenne pour ces trois années) ne semble devoir être que passager, étant donné que les entrées dans les grands séminaires, « clandestins » comme « officiels », sont sur la même tendance descendante. On comptait ainsi 550 séminaristes « clandestins » en 2010 mais seulement 300 en 2014; pour les « officiels », les chiffres sont respectivement de 630 et 560 pour 2010 et 2014.
Chez les religieuses, les courbes sont encore plus impressionnantes: 2 500 novices étaient en formation en 2000; elles ne sont plus que 156 en 2014 (toutes communautés confondues, les « clandestines » se portant un peu mieux que les « officielles »). Ainsi que le note Anthony Lam, les années 2000, une époque où personne ne parlait de crise des vocations mais où, au contraire, on construisait des séminaires et des noviciats toujours plus grands, semblent bien révolues.
Le chercheur n’élabore pas sur les raisons de ce plateau pour le nombre des fidèles et de ce déclin pour le nombre des vocations. Il écrit seulement que les raisons, « y compris politiques », en sont « multiples ». Il souligne l’urgence à s’occuper de la formation continue des jeunes prêtres, formés dans des séminaires où l’important était de donner une formation de base, formation qu’il est nécessaire d’approfondir aujourd’hui. Il estime urgent d’améliorer la formation dispensée aux laïcs, qui devront prendre leur part au sein de communautés où les prêtres seront moins nombreux. Il appelle enfin à encourager les vocations tardives. « A mesure que le pays bascule vers une société de classes moyennes, un nombre grandissant de personnes actives et bien formées réexaminent leur vie et certains peuvent penser à changer de voie. Il est important de penser à éveiller chez elles la possibilité d’une vocation. L’Eglise se doit de les soutenir dans leur recherche spirituelle et leur discernement vocationnel », conclut Anthony Lam.
Statistiques (au 31 décembre 2015)
Catholiques: 9 à 10,5 millions
Diocèses: 138 (116 actifs et 22 inactifs)
97 (selon les autorités chinoises)
Evêques: 112 (dont 99 en ministère, répartis en 70 « officiels » et 29 « clandestins »)
Prêtres: 2 500 pour les « officiels »
1 300 pour les « clandestins »
Grands séminaires: 9 (avec 425 séminaristes)
Petits séminaires: 20 (avec 300 séminaristes)
Séminaires « clandestins »: 10 (avec 200 séminaristes)
Religieuses « officielles »: 3 170 (au sein de 87 communautés)
Religieuses « clandestines »: 1 400 (au sein de 37 communautés)
(Source: Eglises d'Asie, le 13 mai 2016)
Anthony Lam Sui-ki est chercheur au Centre d’études du Saint-Esprit, le centre de recherches sur la Chine du diocèse de Hongkong. Depuis de longues années, il compile les données et les études sur le sujet; il livre ses conclusions dans un article de la dernière livraison de la revue Tripod. Selon lui, la tendance qui émerge de ces dernières dix années est celle d’une stagnation du nombre des catholiques, stagnation qui se traduit par ricochet par une baisse du nombre des vocations sacerdotales et religieuses.
A peine 1% de catholiques parmi 1,3 milliard d’habitants
Concernant le nombre des catholiques en Chine, la fourchette la plus plausible oscille entre 9 et 12 millions de fidèles. Une étude de l’Académie chinoise des sciences sociales d’août 2010 donnait le chiffre de 5,7 millions de catholiques, ce qui ne refléterait que la partie « officielle » du catholicisme chinois. Selon Anthony Lam, le chiffre le plus crédible, toutes communautés confondues, serait plus proche des 10,5 millions de fidèles, soit un petit 1 % de la population du pays (0,77 % très précisément). Ce qui confirme une réalité bien connue: le catholicisme est très minoritaire en Chine populaire, et les choses accusent ici une certaine stabilité: en 1949, date de la prise du pouvoir par Mao Zedong, les catholiques étaient 3 millions pour une population totale de 500 millions, soit une proportion de 0,60 %.
Plus intéressant est le fait que la croissance de la communauté catholique, qui était manifeste dans les années 1990 et début 2000, semble avoir atteint un plateau. Anthony Lam étaye ainsi sa démonstration: en prenant comme base une communauté de 12 millions de fidèles, dont l’espérance de vie serait semblable à celle de l’ensemble de la population (75,6 ans), et en présumant que l’âge moyen au baptême est de 18 ans, chaque année, l’Eglise devrait enregistrer 210 000 nouveaux baptisés pour ne serait-ce que compenser les décès naturels. Et ceci sans prendre en compte d’éventuelles « pertes en ligne », que représenteraient le départ de catholiques vers d’autres Eglises, religions ou la non-croyance.
Selon les données de la partie « officielle » de l’Eglise, entre 2004 et 2010, le nombre annuel moyen de baptêmes a oscillé entre 90 000 et 100 000. Si l’on ajoute à ce chiffre celui des baptêmes des communautés « clandestines », on peut penser que le chiffre des 210 000 nouveaux baptisés nécessaires au maintien du nombre des catholiques en Chine était peu ou prou atteint. Or, depuis 2010, le déclin est patent: entre 2011 et 2015, le nombre moyen des baptêmes célébrés lors de la Vigile pascale a été de 21 500. Si on y ajoute les baptêmes célébrés à d’autres moments de l’année, on arrive à 30 000 - 35 000 baptêmes/an au sein des communautés « officielles ». Même en y ajoutant les baptêmes des communautés « clandestines », on n’atteint pas – et de loin, semble-t-il – les 210 000 baptêmes nécessaires. Conclusion du chercheur hongkongais: « Il paraît évident que le nombre des catholiques va en diminuant. »
Net déclin des vocations sacerdotales et religieuses
Après une phase de croissance très nette, dans les années 1980, 1990 et début 2000, la population catholique aurait donc atteint un plateau, voire aurait commencé à décliner. « Ce retournement va entraîner une baisse du nombre des vocations, même si ce dernier phénomène prendra quelques années à se concrétiser pleinement », explique encore Anthony Lam. En 2000, toutes communautés confondues, on a compté 134 ordinations sacerdotales, le chiffre est monté à 171 en 2002 et n’a jamais été dépassé depuis. Entre 2005 et 2011, le déclin est quasi continu, jusqu’à seulement 46 ordinations en cette année 2011. Le léger mieux des années 2012 à 2014 (74 ordinations en moyenne pour ces trois années) ne semble devoir être que passager, étant donné que les entrées dans les grands séminaires, « clandestins » comme « officiels », sont sur la même tendance descendante. On comptait ainsi 550 séminaristes « clandestins » en 2010 mais seulement 300 en 2014; pour les « officiels », les chiffres sont respectivement de 630 et 560 pour 2010 et 2014.
Chez les religieuses, les courbes sont encore plus impressionnantes: 2 500 novices étaient en formation en 2000; elles ne sont plus que 156 en 2014 (toutes communautés confondues, les « clandestines » se portant un peu mieux que les « officielles »). Ainsi que le note Anthony Lam, les années 2000, une époque où personne ne parlait de crise des vocations mais où, au contraire, on construisait des séminaires et des noviciats toujours plus grands, semblent bien révolues.
Le chercheur n’élabore pas sur les raisons de ce plateau pour le nombre des fidèles et de ce déclin pour le nombre des vocations. Il écrit seulement que les raisons, « y compris politiques », en sont « multiples ». Il souligne l’urgence à s’occuper de la formation continue des jeunes prêtres, formés dans des séminaires où l’important était de donner une formation de base, formation qu’il est nécessaire d’approfondir aujourd’hui. Il estime urgent d’améliorer la formation dispensée aux laïcs, qui devront prendre leur part au sein de communautés où les prêtres seront moins nombreux. Il appelle enfin à encourager les vocations tardives. « A mesure que le pays bascule vers une société de classes moyennes, un nombre grandissant de personnes actives et bien formées réexaminent leur vie et certains peuvent penser à changer de voie. Il est important de penser à éveiller chez elles la possibilité d’une vocation. L’Eglise se doit de les soutenir dans leur recherche spirituelle et leur discernement vocationnel », conclut Anthony Lam.
Statistiques (au 31 décembre 2015)
Catholiques: 9 à 10,5 millions
Diocèses: 138 (116 actifs et 22 inactifs)
97 (selon les autorités chinoises)
Evêques: 112 (dont 99 en ministère, répartis en 70 « officiels » et 29 « clandestins »)
Prêtres: 2 500 pour les « officiels »
1 300 pour les « clandestins »
Grands séminaires: 9 (avec 425 séminaristes)
Petits séminaires: 20 (avec 300 séminaristes)
Séminaires « clandestins »: 10 (avec 200 séminaristes)
Religieuses « officielles »: 3 170 (au sein de 87 communautés)
Religieuses « clandestines »: 1 400 (au sein de 37 communautés)
(Source: Eglises d'Asie, le 13 mai 2016)